Découvrez comment s’est passé l’été dernier pour l’armailli Janine Jourdan et son équipe, pourquoi l’alpage de Curtginatsch connaît trois déménagements et pourquoi l’on y produit depuis peu du fromage quadrangulaire.
À Mathon, c’est le car postal qui donne le coup d’envoi de la montée à l’alpage. Une fois qu’il a traversé le village, les paysans emmènent leurs vaches à l’alpage à pied. À moins que les bêtes, trop impatientes, décident de se mettre en route plus tôt.
Sur presque tous les alpages pourvus d’une fromagerie, on trouve quelques porcs des Alpes. C’est aussi le cas à Curtginatsch. Le 28 porcs mangent le petit-lait issu de la production du fromage. C’est ainsi qu’un déchet devient jambon, si l’on peut dire. Autrefois, selon le nombre de vaches estivantes, chaque paysan emmenait un ou deux de ses porcs sur l’alpage. Ce système avait cependant des effets indésirables: les bêtes se blessaient souvent en se battant pour établir la hiérarchie dans le nouveau groupe, et, surtout, elles se transmettaient mutuellement des maladies. «Il y a 30 ans, il était normal qu’un quart des porcs des Alpes ne survivent pas à l’été», se rappelle Simon Beeli, paysan de montagne de Mathon. Aujourd’hui, ces problèmes n’existent plus, car les porcs proviennent de la même étable et ont déjà cohabité au préalable.
En principe, l’électricité ne pose aucun problème sur l’alpage de Curtginatsch: une petite centrale hydraulique fournit du courant neutre en CO2 à la fromagerie et au chalet et les deux emplacements du dispositif de traite mobile sont raccordés. En principe. Car, en réalité, l’alimentation en électricité pourrait être grandement améliorée. La centrale hydraulique ne disposant pas d’un réservoir suffisamment important, elle ne peut produire assez d’électricité en cas de sécheresse. L’été dernier, cela a été le cas pendant presque toute la saison d’alpage, ce qui a obligé les montagnardes et montagnards à recourir fréquemment au générateur bruyant et nauséabond installé derrière l’étable. Lorsque, un jour, celui-ci a rendu l’âme, les vachers, Marc et Aron, ont eu des sueurs froides. Car, sans électricité, pas de traite. Et sans traite, pas d’exploitation.
Cet été, à l’alpage, l’armaillie Janine Jourdan et son auxiliaire Lorenz Mohring transforment 80 000 litres de lait en fromage. Ils obtiennent ainsi un peu plus de sept tonnes de fromage d’alpage. Presque chaque jour, ils exécutent leur danse de la harpe dans la fromagerie de l’alpage.
J’ai accompagné les alpagistes de Curtginatsch pendant tout un été. J’ai couru derrière les vaches, ma caméra à la main, pendant la montée à l’alpage et, là-haut, j’ai admiré un des levers de soleil les plus spectaculaires de ma vie et vu en une journée plus de marmottes qu’au cours de tout l’été. J’ai profité de l’air frais à plus de 2000 m d’altitude pendant que la canicule sévissait dans la vallée et, un jour, mes orteils ont presque gelé sous la bruine. J’ai fait plus ample connaissance avec les montagnardes et montagnards et mangé des croûtes au fromage, des cornettes et du pain avec eux et, en échange, je leur apportais des fruits et légumes frais et des croissants aux noisettes lors de mes visites. J’ai emprunté dix fois les routes de montagne étroites et sinueuses qui mènent de Wergenstein à Curtginatsch. Et chaque fois, j’ai eu un peu plus l’impression de rentrer chez moi lorsque j’atteignais le point culminant et que les prairies et les bâtiments de «mon» alpage se dévoilaient à mes yeux.
Max Hugelshofer
Rédacteur