Il faut savoir lire dans les pierres

Le travail de la pierre exige du temps et du doigté car chaque bloc, chaque plaque est un peu différent. C’est ce qui fascine Alessio Paganini, propriétaire de Paganini Crap AG.

«On ne peut pas couper la pierre n’importe comment à cause de sa structure intérieure qu’il faut respecter car sinon elle éclate. Même lorsqu’il s’agit d’une pierre typique du Puschlav, une pierre brillante de couleur bleu-vert, entremêlée de structures de metabasalt velues. Une pierre, comme le Campascio, le granit des Grisons, que notre famille exploite depuis près de 70 ans dans des carrières toutes proches. C’est la raison pour laquelle notre entreprise a son atelier pour le travail de la pierre ici, a deux kilomètres à peine de la frontière italienne, séparée du reste de la Suisse par le col de la Bernina. Mon grand-père a commencé avec quelques machines et petit à petit il a pu acheter du terrain.

Nous proposons naturellement aussi de nombreuses sortes de pierres étrangères: du granit, du gneiss, du marbre. Mais à mon avis, le mieux c’est de travailler la pierre depuis son extraction jusqu’au produit fini. L’étape la plus importante se fait déjà lors du dynamitage. Pource faire, nous utilisons pour le granit de la poudre noire et non de la dynamite. La rupture se fait alors le long des lignes défectueuses de la falaise. Il faut repérer où elles se trouvent et le marquer sur le bloc. Quand le bloc est retourné et qu’on l’embarque, il est pratiquement impossible de reconnaître ensuite ces lignes sur le granit. Et lorsqu’on le fraise dans le mauvais sens, on ne peut pas utiliser la plaque pour n’importe quel travail. Chaque bloc est un peu différent, parfois plus tendre, parfois plus dur que ce à quoi on s’attend. Quand j’ai traité la pierre brute, je peux ensuite régler correctement les machines. Quelqu’un qui place une pierre sur la fraiseuse sans prendre en considération sa structure et règle la machine sur standard s’expose à ce que soit la pierre, soitla machine s’abîment.

Le projet en bref

  • Entreprise de traitement de la pierre
  • Achat d' une machine CNC
  • Zalende/GR

Période pour les commandes importantes

Ici, nous pouvons produire pratiquement tout ce que l’on veut à partir de pierres naturelles: cela me fascine. La polyvalence est rare en Suisse. Ce qui est le plus demandé, ce sont les revêtements pour les cuisines. Le clou, c’est de devoir fraiser au millimètre près le trou et l’évidement pour y installer les plaques chauffantes. Nous utilisons pour ce faire des chablons. Jusqu’à il y a environ dix ou quinze ans, il y avait environs trois à quatre modèles de cuisinières. Maintenant, il y en a 40 à 50, et chaque année ce sont deux à trois modèles qui viennent s’ajouter.

Nous devons faire fabriquer les chablons qui coûtent cher et remplacer régulièrement les anciens. Pour certains modèles, il faut même deux chablons. Mon père et moi nous nous sommes alors mis à calculer. C’était évident pour nous: ou nous investissions, ou nous allions devoir fermer très vite. La concurrence italienne est énorme. Nous sommes en ce qui concerne le travail manuel 10 à 15 pourcents plus cher. Ce n’est pas beaucoup mais suffisant pour faire pencher la balance. Les clients qui privilégient le «Made in Switzerland» sont rares. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé d’acheter une fraiseuse CNC, qui peut aussi servir pour les gravures. Parmi les fraiseuses CNC, celles pour la pierre sont le top car elles sont extrême-ment stables. Et aucune d’elles ne peut tout faire. Il convient donc de bien réfléchir pour quel genre de travail on en a besoin.

J’ai toujours été contre de tels automates, mais la main-d’œuvre est trop cher. La machine CNC aura besoin – comme nous aussi - d’environ quatre heures pour fraiser les évidements pour les revêtements de cuisine et pour polir les bacs d’écoulement, mais une fois qu’elle est réglée correctement, elle réalise toutes les étapes. Pendant ce temps-là, nous pouvons faire d’autres choses et espérons-le accepter des commandes plus importantes.

paganinicrap.ch

Texte: Alexandra Rozkosny

Images: Yannick Andrea

Paru en janvier 2021

Notre soutien

La petite entreprise de traitement de la pierre Paganini Crap doit faire face à des concurrents internationaux. Et : les Italiens sont moins chers. Afin de devenir plus efficace et moins cher, l'entreprise investit dans une machine CNC à table basculante avec le soutien de l'Aide suisse à la montagne avec une table basculante. Une nouveauté pour une si petite entreprise.
L’Aide suisse à la montagnes apporte un soutien financier lorsque l’argent ne suffit pas pour réaliser un projet porteur d’avenir.