«Nous voulons vieillir à l’alpage»

Certaines personnes partent voyager dès leur retraite. Lucia et Marco Salmina, quant à eux, préfèrent leur petit alpage dans le Val de Maggia.

L’étable, les pâturages, la majeure partie du bétail, tout était en affermage. Après leur retraite, il ne reste aux modestes paysans Lucia et Marco Salmina qu’une maigre rente et un chalet à Capoli dans le Val Maggia. Ils continuent donc à exploiter cet alpage car ils ne pourraient imaginer de vivre autrement.

«Nous voulons continuer à exploiter l’alpage de Capoli aussi longtemps que nous serons encore en forme. C’est notre deuxième maison. Nous avons passé ces 40 dernières années à y faire estiver des chèvres et des vaches et à fabriquer du fromage. Ce serait regrettable de devoir abandonner tout cela, car nous sommes les derniers à exploiter encore les pâturages de l’alpage de Capoli. Les rustici qui sont aux alentours ne servent plus que comme maisons de Et nous nous sommes investis corps et âme dans cet alpage. Comme de nombreux rustici dans le Val Maggia, le chalet était passablement délabré. Rien d’étonnant à cela car il datait de 1877. Peu à peu, nous avons remis en état les vieilles bâtisses de pierre. Nous avons construit une petite fromagerie et une cave à fromage et aménagé une salle de bains. Tout au début, nous avons aussi installé des mètres et des mètres de tuyaux pour relier l’alpage au réseau d’eau. Et il y a quelques années, nous avons installé des panneaux solaires sur le toit qui nous fournissent courant et eau chaude.

Une montée à pied d’une heure

L’un des investissements les plus importants a été le téléphérique pour le transport du matériel. L’alpage de Capoli n’est accessible qu’à pied et il faut une bonne heure de marche depuis la vallée pour y arriver. Les premières années, ous devions toujours avoir recours à un hélicoptère pour transporter tout ce dont nous avions besoin pour la saison d’alpage. Lorsque nous avions oublié quelque chose ou que les provisions s’avéraient insuffisantes, nous devions redescendre dans la vallée et charrier ensuite la marchandise à pied. Nous avons eu ensuite la chance de pouvoir reprendre gratuitement un ancien téléphérique de l’armée. L’Aide Suisse aux Montagnards nous avait soutenus à l’époque pour sa remise en état et nous a aidés à nouveau il y a deux ans pour l’achat d’un nouveau moteur. Sans téléphérique, nous serions complètement paumés, surtout maintenant que nous prenons de l’âge et ne pouvons plus porter de lourdes charges.

L’alpage de Capoli est en quelque sorte notre rente vieillesse, car le chalet ici est tout ce que nous possédons. Jusqu’à notre retraite, nous pouvions louer à la commune un petit terrain ainsi qu’une étable. Les chèvres aussi nous les louions à un autre paysan car nous n’avions pas l’argent pour les acheter. Comme Marco et moi ne venons pas d’une famille de paysans, nous n’avons pas eu l’opportunité de reprendre la ferme de nos parents, comme c’est souvent le cas. J’ai fait une formation dans les soins infirmiers et mon mari est monteur électricien, mais il ne souhaitait pas passer sa vie sur les chantiers. Nous savions que nous étions faits pour être paysans, élever des bêtes, travailler dans la nature et pourvoir à nos propres besoins. Et nous y parvenons bien ici sur l’alpage de Capoli. Nous avons un jardin potager et des arbres fruitiers. Avec les cerises et les baies, je fais de la confiture que je vends à nos connaissances. Marco abat du bois en automne, que l’on transporte aisément à Aurigeno dans la vallée, grâce au téléphérique. Cela nous permet de nous chauffer tout l’hiver. A l’avenir, nous aimerions travailler pour d’autres paysans et refaire du fromage pour avoir un petit complément de rente.

Un coin ensoleillé en hiver

L’alpage, c’est notre avenir. Maintenant que notre cadette est partie de la maison, nous envisageons de quitter l’appartement que nous louons à Aurigeno et de vivre ici sur l’alpage à l’année. Marco est pleinement acquis à la cause. Depuis que nous avons le chalet d’alpage, il a souvent bravé la neige pour y monter afin d’y passer quelques jours et de profiter du soleil, car en hiver dans la vallée on ne voit pas le soleil pendant des mois. Cet isolement ne lui déplaît pas. En ce qui me concerne, j’aime bien aller boire de temps en temps un café avec des amis.

Paru en septembre 2016

Le projet en bref

  • Alpagiste
  • Nouveau moteur pour un téléphérique de transport
  • Aurigeno/TI
L’Aide suisse à la montagnes apporte un soutien financier lorsque l’argent ne suffit pas pour réaliser un projet porteur d’avenir.